Pigling-Bland a écrit :Jalias a écrit :
La troisième partie notamment semble réellement avoir été rajoutée histoire de pouvoir proposer une fin à une intrigue qui commence à tourner en rond, et permettre à Spirou et Fantasio de briller un peu en attrapant le méchant de la semaine.
Non, on ne peut pas écrire ça car ce scénario a été élaboré par Franquin sur la base d'un scénario fleuve d'Henri Gillain (frère de Jijé). Franquin a non pas rajouté des pages pour finir mais plutot élagué dans un scénario qui représentait en fait plusieurs albums...
Je vais rechercher les propos même de Franquin dans l'interview "Et Franquin créa la gaffe" et je la citerai tres précisément.
Zig Homard a écrit :ça est dans le tome 2 de l'intégrale :
- HG m'avait envoyé un carnet épais comme une Bible. Si j'avais voulu le réaliser, j'y serais encore... J'ai taillé là-dedans, car c'était une espèce de roman-fleuve. [...] J'ai beaucoup trié pour dégager le récit définitif...
C'est tout à fait vrai... mais ça ne change rien.
Je m'explique. Peu importe que Franquin ait travaillé sur la base du texte de Gillain, je ne juge pas le texte de Gillain, mais bien la version finale, élaguée, de Franquin.
Et d'un point de vue narratif, on distingue 3 parties à l'intrigue (voire 4)
La première, la plus longue va de la page 5 (première page) à la page 40-41 et couvre toute l'intrigue associée au titre de l'album : les événements à Champignac, le faux coupable, le vrai sorcier, la résolution (cette partie, avec les super-pouvoirs de Fantasio, est tout de même un peu à part).
La deuxième partie, qui est une suite à peu près logique de la première, concerne les exploits sportifs du Comte, va de la page 41 à la 45, et sert à introduire la dernière partie sur le voleur (fin de la 45 à la 61).
Déjà, on peut constater que ces parties, qui ont des thématiques TRES différentes, sont complètement disproportionnées en taille les unes par rapport aux autres. L'intrigue à Champignac prend à elle seule plus de la moitié de l'album (35 pages), la dernière n'en fait que 16. En conséquence, le cœur de l'intrigue est bien ce qu'il se passe à Champignac. Le problème c'est que cette partie ne permet pas d'arriver à une conclusion totalement satisfaisante d'un point de vue narratif (globalement car maintenant que le mystère du sorcier est résolu, il reste beaucoup à dire autour des potions du Comte), d'où l'ajout de la suivante qui a pour but de relancer l'intrigue (maintenant qu'il n'y a plus de mystères, on passe à l'humour, puis à l'action-aventure) ainsi que de donner l'impression d'une conclusion naturelle à l'histoire (le Comte et Spirou sont amis, le Comte sait que ses potions sont dangereuses et ne les utilisera plus, le méchant est arrêté).
En conséquent, que cette dernière partie ait été voulue par Gillain ou Franquin peu importe, elle n'existe (elle n'a été ajoutée) que pour permettre d'arriver à une fin acceptable. (c'est d'autant plus vrai dans le cadre d'un roman-fleuve, qui cherche continuellement à reculer la fin de l'histoire)
Deuxièmement, quand bien même Franquin se base sur l'intrigue de Gillain, il me semble tout de même qu'il travaillait en flux tendu. Je peux me tromper bien entendu, mais l'impression que j'ai à la lecture de l'album c'est que Franquin s'appuyait sur le texte de Gillain mais brodait/réécrivait/élaguait au fur et à mesure des planches (vu les rythmes de parution de l'époque, j'ai du mal à croire que Franquin ait pris tout son temps pour parachever son scénario avant de démarrer les dessins). ça explique pour moi les écarts si grands entre les parties : il me semble qu'à la base Franquin voulait s'appuyer uniquement sur la partie à Champignac (d'où le fait que cette partie soit si grande en nombre de pages), avant de se rendre compte que ce n'était pas tenable, et de prendre d'autres éléments du scénario de Gillain.
Bien entendu, encore une fois je peux me tromper, et je n'ai pas "Et Franquin créa Lagaffe" où il se peut qu'il y ait bien plus d'informations sur son processus créatif. Néanmoins c'est l'impression laissée par cet album.
En conclusion, l'album laisse l'impression d'une troisième partie "à part" un peu juxtaposée là pour conclure l'histoire. J'espère ainsi que mon ressenti est plus clair.
Tout ceci prouve en tout cas qu'il est important que je retravaille mes critiques en fonction des remarques pour proposer un texte le plus clair possible
