Numéro 4449 du 19/07/2023
Ici la présentation illustrée par jeepcook
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J'ai lu le premier tome de La bête (version supplément
Spirou) pour mieux suivre le second en cours. On y voyait donc un enfant juif, riche (ben voyons), premier de la classe (ben voyons), qui y était tortionnaire d'un gamin pauvre dont le père était un soldat allemand.
Zidrou avait fait très fort. Dans le tome deux, en cours, visiblement intitulé Rédemption dans la tête du scénariste, cet enfant rétorque à sa mère (qui méprise les ouvriers et leurs enfants, ben voyons) "Parce qu'on nous a fait souffrir, ça nous donne le droit de faire souffrir les autres?". Ho, la fine allusion. Sacré Zidrouille. Sinon,
Frank Pé fait lire un exemplaire de
Tintin (numéro 48 de l'édition belge, daté du 30 novembre 1955) au gamin qui aime les animaux non par clin d' œil ou provocation comme je le sous-entendais la semaine dernière mais parce qu'il y trouve les histoires de
Chlorophylle, par
Macherot, ce qui est bien vu, car l'histoire se passe fin 1955, et à l'époque il n'y avait pas encore de série animalière dans
Spirou. Par contre, je vais jouer le jeu du lecteur de l'hebdomadaire, et vais donc poser une question qui trouvera peut-être sa réponse dans la suite de l'histoire. En 1955 le marsupilami était déjà apparu dans
Spirou depuis quelques années. Comment se fait-il qu'aucun gamin parmi tous ceux présents dans l'histoire n'ait reconnu le marsupilami en le voyant en vrai? Pas possible qu'aucun de ces enfants bruxellois ne lise alors
Spirou...
Deux évènements dans ce numéro, le début d'une nouvelle série et le retour de
Boule et Bill, mais ce sont les
Fabrice qui sont mis en vedette en couverture (avec des personnages de
Passe moi l'ciel en invités) ainsi que dans deux histoires où ils sortent du cadre du bureau mais, à la plage, s'y montrent aussi inadaptés. Rien à dire du
Boule et Bill de
Cazenove et
Bastide ©Studio Boule et Bill 2023. Peu à dire aussi de la nouvelle série,
Kyle travel, de
Marco Russo (scénario),
Alessio Zonno (dessin) et
Pinelli (couleurs), de style global manga, que je décris comme ligne ligne. La ligne claire est claire, la ligne ligne n'est qu'une ligne, minimale, qui ne fait que délimiter des espaces, ne les modèle pas, ne les fait pas vibrer, seuls les multiples gros plans sur des yeux, traités, à la manière de
Takashi Murakami, avec une outrance de détails irréels, comme des êtres à part entière, semblent avoir une existence propre. J'ai plus à dire sur l'interview de rigueur présentant la série. Si des questions telles que la place de la BD dans le pays des auteurs, italiens, ou leurs goûts en la matière, sont intéressantes car ouvrent sur d'autres regards (rien que du connu pour tout amateur de BD transalpine, mais apprenant aux autres que les jeunes Italiens ne lisent quasi que du manga ou du
Disney, les plus vieux les "vieilles légendes" comme
Diabolik ou
Tex) , celles (non spécifiques à cette série, j'en parle juste aujourd'hui) portant sur ce que les auteurs ont voulu faire et dire sont bêtement dépréciatives. Franchement, en quoi un auteur, j'allait écrire "de BD pour enfants", mais c'est valable pour toute œuvre, doit-il expliquer celle-ci? S'il doit le faire, c'est qu'il la ratée, s'il n'en a pas besoin mais est sommé de le faire toute de même, c'est prendre les lecteurs pour des idiots.
Le scénario de l'autre histoire courte du numéro est mal construit:
Parker et Badger posent pour un sculpteur étant censé rechercher des "modèles au physique ingrat", et cette révélation est censée faire gag, mais il s'avère qu'il sculpte en fait des personnages du magazine
Spirou. Mis à part cela, dans ce nouvel épisode de
L’année des héros, le dessinateur
Thomas Priou (
La clairière s'amuse), le scénariste
Giovanni Jouzeau (auteur surtout chez
Okapi) et le coloriste
Julien Flamand n'offrent pas de regard particulier à cette série qui n'a paru qu'une dizaine d'années dans
Spirou mais a marqué par la sympathie qu'inspiraient ces deux marginaux et le ton et la galerie de personnages truculents de
Marc Cuadrado.
Le reste du magazine est toutefois de meilleur aloi par ses séries habituelles,
Dad de
Nob,
Crash Tex de
Dab's,
La pause cartoon (strips et dessins), le bulletin d'abonnement de
Cromheecke et
Thiriet, une nouvelle occurrence d'un running gag de
Kid Paddle de
Midam, Patelin, Dairin et
Angèle, un
Psychotine de
Romain Pujol et huit dessinateurs sur huit cases de mondes parallèles.
Suite trépidante, dans le dessin comme dans l'histoire, de
Spirou à Berlin, de
Flix.
Fin du deuxième épisode du
Roi louve (dont le troisième tome sort bientôt...), autre série surexpliquée, mais avec toutefois des commentaires plus intéressants que ceux concernant un shonen basique tel qu'est présenté
Kyle travel. L'histoire, par le dessin simplement efficace d'
Adrián, fait pour une lecture haletante, se lit vite, malgré une histoire qui "mélange beaucoup de choses", les scénaristes
Denis Lapière et
Émilie Alibert dixit. Heureusement, les nombreux messages que veulent transmettre les auteurs ne prennent pas le pas sur l'histoire elle-même, fantasy traditionnelle, pas pour les plus jeunes vus la violence et la suggestion de certaines scènes (je signale aux auteurs que les onomatopées "Haaa je hooo" de la transformation de Pétigré servaient à
Charlie Schlingo dans ses scènes de sexe) mais assez prenante, et aux personnages incarnant des questions que se posent les générations actuelles.
Dans le rédactionnel,
Fred Simon dans
Spirou et moi est un autre de ces auteurs bretons (que je n'ai pas lu), avec
Lepage, Plessix et tant d'autres pour qui
Fournier a été un mentor.
Théo Grosjean, interrogé sur le tome 2 d'
Elliot au collège à paraître bientôt, montre qu'il parie sur l'intelligence de ses lecteurs avec un album centré sur l'importance primordiale des réseaux sociaux dorénavant chez les tous jeunes, "ni critique ni complaisant", avec l'image d'un selfie sur un portable monde en lui-même. Enfin, nous sommes
Bienvenus dans la bibliothèque de
Jean-Luc Deglin, auteur de l'assez épisodique chat
Crapule (8 strips l'an dernier, encore aucun cette année), qui ressemble assez à la mienne dans ce qu'il présente, en littérature, de
Rabelais à
Borges,
Karel Čapek (lisez sa
Guerre des salamandres) et
Philip K Dick, en passant par l'auteur de SF
R.A. Lafferty, "un dingue qui ne va rien dire à personne" (mon nom doit être Personne, vu que je l'ai dans ma bibliothèque, par des nouvelles parues dans la revue
Univers, qui publiait dans les années 70-80 des nouvelles de SF par des auteurs nouvelle vague, avec des couvertures et illustrations de
Forest, Caza, Bilal, Solé et bien d'autres), ainsi que, en BD, les mangas de
Fumiko Takano, trop peu traduite en français (ou en anglais) ou l'autobiographie décalée (que pouvait-on attendre d'autre de lui) de
Osamu Tezuka.
" Monólogo significa el mono que habla solo." Ramón Gómez de la Serna dans ses Greguerías.